
Vivre en famille dans une chambre d’hôtel.
Le projet de l’OHI 115 devait montrer les conditions des personnes hébergées en hôtels. Mon désir était de les représenter autrement que par la détresse et la vulnérabilité.
Lors du premier contact, j’expliquais les raisons de ces photos, de l’enquête et de l’exposition.
Parfois, ce que j’ai vu de la vie des couples ou des familles m’a rappelé des souvenirs vécus dans ma propre famille, et j’ai souhaité partager ma manière de produire une image, en donnant un rôle aux personnes dans la fabrication de l’image (cadre, lumière).
Le plus fréquemment, c’est avec un enfant, une adolescente, ou une mère, que je suis le mieux parvenu à faire une image (nature morte avec casserole, livre en équilibre instable, portrait avec l’eau du bain), appelant au rêve, ou à la dignité.
En concoctant la prise de vues avec l’occupant de la chambre, j’ai accepté le risque de faire divaguer mon projet autour du motif initial de ma commande. Il ne s’arrête pas à une réalité supposée, ni à une objectivité prétendue, mais dit une manière de faire ensemble. Je pourrais presque dire, chaque photographie, en plus de témoigner de notre rencontre, est un autoportrait.
Je place ma photographie dans un espace de fiction sur lequel les personnes peuvent agir. En ce sens, je trouve qu’elle met à l’œuvre un principe d’égalité.
Je laisse parfois exagérément apparaître mon dispositif. Héritier de Gisèle Freund, je pense que ma responsabilité est de me situer dans cette photographie en marquant la trace de cette facture de l’image.